Ce « plateau ouvert » comme on pourrait le dire en français est une méthode travail relativement controversée. Si on doit cette invention à des allemands, elle a rapidement trouvé sa place aux Etats-Unis. Elle tend à se démocratiser en Europe et notamment en France. Gage de productivité pour les uns, source de conflit et de manque de concentration pour d’autres, l’open space connait des admirateurs farouches et des détracteurs féroces. Nous faisons le point.
Un open space, c’est quoi ?
Un open space est donc une surface de travail sur laquelle on installe plusieurs bureaux. Les employés sont donc tenus de travailler ensemble. Certains open space sont équipés de cloisons anti-bruit, vitrées ou non qui permettent au personnel de travailler dans un calme relatif. Cela est censé leur conférer un peu d’intimité. Mais il est courant de n’avoir que des rangées de bureaux. Chaque personne possède le sien pour remplir sa tâche au quotidien. On estime qu’en Grande Bretagne, la majorité des personnes actives travaillerait en open space (73%). Cette étude parle de 18% seulement des actifs français. Il faut ici revenir sur l’idée originelle des créateurs, les frères Schnelle. Ils avaient imaginé l’open space comme étant un endroit très vaste, propice aux déplacements. Ils prévoyaient également la présence de plantes, pour une atmosphère de travail détendue. Alors, qu’en est-il, exactement ? Quels sont les points forts de l’open Space et quels sont ses défauts ?
Les avantages de l’open space
Il est vrai que pour un chef d’entreprise, mettre en place un open space se révèle moins coûteux en termes d’agencement. Il n’a pas besoin de prévoir des espaces cloisonnés et personnalisés pour chacun de ses salariés. En cas de développement d’activité, il lui suffit d’ajouter un nouveau bureau. De même, pour un projet spécifique, il sera plus aisé de créer des groupes qui permuteront dans l’espace ouvert pour travailler ensemble.
En cas d’embauche, le nouveau salarié peut rapidement trouver ses marques. Son apprentissage se fait en côtoyant ses collègues avec lesquels il peut échanger plus librement. C’est d’ailleurs un des buts premiers de l’open space : favoriser les échanges humains, créer une émulation et pouvoir compter sur des personnes ressources, sans avoir de déplacement à faire.
On peut également parler d’un statut égalitaire entre salariés. Tout le monde possède le même espace de travail. On ne peut pas parler, dans ce cadre, de favoritisme.
Pour le chef d’entreprise, cela permet d’avoir une vue d’ensemble sur le travail accompli. Il peut également, faire part de certaines dispositions et changements, en s’adressant à tous. L’open space vise, dans cette optique de coopération, à augmenter la productivité de l’activité.
Les inconvénients de l’open space
Chaque médaille a son revers. Si l’open space présente beaucoup d’attraits pour le chef d’entreprise, comment est vue cette façon de travailler, par les salariés ? Même si globalement, ils s’estiment satisfaits de cette méthode (Plus de la moitié des actifs, travaillant en espace collectif ouvert), ils ont néanmoins quelques inconvénients à pointer du doigt.
Là où certains parlent d’émulation, les salariés ont plutôt tendance à voir une compétition, qui met à mal l’ambiance de groupe. Le fait que le chef d’entreprise travaille au sein même de son équipe peut engendrer un sentiment de stress, même si leur travail est correct.
Les salariés voudraient pouvoir néanmoins compter sur un peu plus d’intimité. Si un employeur ne peut interdire l’usage d’un téléphone portable privé sur le lieu de travail, le salarié qui devrait en faire usage, pourrait être entendu par ses collègues. Difficile d’imaginer prendre un rendez-vous médical et d’exposer la situation alors que plusieurs personnes gravitent autour de vous en permanence…
Si l’open space pouvait être bruyant, notamment sans cloisons entre les bureaux, il est désormais soumis à réglementation (depuis mars 2016). Il faut ainsi respecter la norme NF S31-199, relative à l’acoustique dans les espaces de travail, tels que les open space.
Dans les open space totalement décloisonnés, il peut être difficile de se concentrer sur sa tâche. Les conversations ininterrompues, la sonnerie des téléphones peuvent représenter une nuisance sonore permanente. Or, la nuisance sonore peut avoir des incidences sur la santé, aussi bien physique que psychique. Une étude de santé menée par l’INRS prouve que 6 personnes sur 10 sont importunées au quotidien par les bruits émis par leurs collègues de travail. La fatigue auditive est un des premiers symptômes et il est relativement insidieux. A la longue, cette fatigue influe sur la qualité de la prestation professionnelle. Une autre étude a porté sur le temps de travail perdu, pour tenter de se recentrer sur le travail à effectuer. Traduit en manque à gagner par l’entreprise, cela représenterait 3840 euros par actif et par an…
Enfin, la proximité en permanence avec des collègues peut générer des conflits. Façon de travailler, tics, retards, tout pouvant être vu et entendu, peut prêter à jugement, attitude négative, rejet. Mettre ensemble des personnes ayant des affinités ou procéder régulièrement à des roulements, permet de ne pas entériner une situation qui risque de mettre à mal la cohésion du groupe. De même, les personnes pourront mieux se découvrir les unes les autres et apprécier ce mouvement (être plus près des fenêtres, éloigné du couloir et des courants d’air…). Des détails qui ont leur importance quand ils sont subis, plusieurs heures par jour…
Comment bonifier le travail en open space ?
Il est néanmoins possible d’améliorer le travail en open space. La loi de 2016 est une avancée et oblige les chefs d’entreprise à réfléchir en amont avant de créer un espace ouvert.
Pour améliorer les conditions de travail en Open Space, il est important de prendre en compte l’importance des cloisons acoustiques. Au plafond, poser des systèmes permettant d’absorber un certain niveau de bruit et la pose de moquette sur le sol, peuvent être des moyens de minimiser les nuisances sonores. Mais d’autres moyens existent pour améliorer l’existant.
Il parait judicieux de regrouper sur un même espace les personnes effectuant un travail similaire. Les échanges seront forcément plus productifs.
Les imprimantes et autres machines qui peuvent générer du bruit, doivent être remisées hors du plateau ouvert. De même, pour limiter le bruit et faire un geste écoresponsable, mieux vaut privilégier la dématérialisation et éviter ainsi l’impression des documents, autant que faire se peut.
Penser à faire des concertations régulières pour traiter les problèmes peut également permettre aux salariés de se sentir écoutés. Là où le chef d’entreprise voit un pied d’égalité, n’oublions pas que le salarié peut, lui, y voir la non reconnaissance de sa personnalité propre. Une session sur le bruit et les nuisances sonores peut avoir un impact positif. Certaines personnes n’ont pas idée du bruit qu’elles émettent (voix forte, ne pas faire attention en passant derrière quelqu’un qui travaille, tout en continuant de parler…).
Il est également nécessaire de prévoir une salle dédiée aux pauses. Exempte de bruit, elle permettra à chacun de prendre quelques minutes, le temps de prendre un café ou une collation. On peut aussi aménager, à l’extérieur, quand cela est possible, un carré potager ou de fleurs et mettre quelques bancs. Cela sera l’occasion, pour les salariés, de se changer les idées, de faire le vide. Prendre conscience de tous ces détails et tenter de trouver des solutions peut nettement améliorer le travail en open space.
L’open Space est-il fait pour tout le monde ?
Si l’open space peut être un système parfait pour le démarchage téléphonique, par exemples, certains métiers ne s’y prêtent pas. Les professions où le secret professionnel ou médical est de mise ne pourront pas exercer en open space. De même, des travaux nécessitant une grande réflexion ou des calculs méticuleux sont peu propices pour être effectués sur un plateau ouvert.
L’open space, système de communication et de rationalisation des coûts ou moyen de contrôler ses salariés ? Il appartient à chacun de lui trouver des points forts et des points faibles. Mais s’il constitue un endroit où l’on va pour exercer un travail, des solutions peuvent y être apportées pour le rendre le plus humain et le plus convivial possible.
Moi qui bosse dans le web en open space je peux confirmer que c’est très convivial et parfois trop… Quand vous devez vous concentrer sur une tâche précise c’est compliqué parfois.
Etant gérant d’une société de traitement acoustique, je ne peux que confirmer vos dires.
Très bon article,